Night’s Birds, pour chœur et violoncelle, prend son inspiration dans deux chansons de John Dowland : Flow my tears et Can you excuse my wrongs, mais c’est avant tout l’atmosphère sombre et désespérée du premier poème qui guide l’évolution formelle de l’œuvre. A plusieurs reprises, la rythmique plus légère, ternaire et syncopée de la seconde chanson (évoquant ce monde des passions et des luttes encore possibles) tente de s’imposer comme une sorte de souvenir à peine déformé de la version initiale de Dowland, mais à chaque fois c’est pour mieux retomber dans l’univers glaçant et sans espoir de Flow my tears, son lyrisme noir obsessionnel et ses enchevêtrements de lignes descendantes souvent chromatiques. Seule la fin laisse apparaître une sorte de sérénité mêlée d’abandon comme un chant venu d’au-delà des enfers. Le style polyphonique rappelle alors celui de la Renaissance anglaise et une musique plus diatonique conclut la pièce, à peine teintée de bribes éparses du climat précédent. Le violoncelle, après avoir été souvent intégré au discours vocal, ou avoir rivalisé avec les voix dans l’aspect déclamatoire (tel un double chœur) ou encore après avoir servi de base rythmique à l’ensemble, clôt la pièce par un chant éthéré et lent, comme une lueur dans ce nocturne tourmenté.
Thierry Escaich