Miroir d’ombres est avant tout une exploration de l’idée du « double ». La première période consiste en la genèse des principaux personnages thématiques structurels, comme cette ligne arpégée égrainée initialement au violon solo ou le profil encore fantomatique d’un élan mélodique plus lyrique débutant par un saut ascendant de neuvième mineure.
Sur une structure rythmique mouvante, reposant sur des cycles de onze croches, se met en place un discours des deux instruments solistes, tantôt en « opposition émotionnelle » (relayé par un dialogue de plans orchestraux en violente opposition de couleurs), tantôt en « fusion », comme dans cette section où les deux solistes enveloppent les volutes orchestrales fermées dans le medium. Souvent encore, le violon apparaît comme l’ombre déformée du violoncelle solo.
La seconde période de l’œuvre débute dans une dualité totale où l’on voit le violon se lancer dans une sorte de « scherzo » fantasque (parfois aux limites du jazz) alors que, dans une tessiture grave et sombre, naît peu à peu, dans un tempo plus lent, un personnage emmené par le violoncelle solo. Entre « interruptions, superpositions », mais aussi « influences » d’un monde sur l’autre, tout un discours se met en place. Ce n’est que progressivement que ces deux « mouvements » superposés se rencontreront, que leur thématique fusionnera dans un bref épisode final où, essentiellement, les deux solistes feront « corps » face à un orchestre de plus en plus puissant.
Thierry Escaich